TROIS REACTIONS

Das son ouvrage Eloge de la fuite, le biologiste Henri Laborit rapporte que, confronté à une épreuve, l’homme ne dispose que de trois choix: 1. combattre; 2. ne rien faire; 3. fuir.

Combattre: c’est l’attidtude la plus naturelle et la plus saine. Le coup reçu est transformé en coup rendu. Mais cette attitude présente quelques inconvénients. On entre dans une spirale d’agression à répétition. On finit toujours par rencontrer quelqu’un de plus fort qui vous met K-O.

Ne rien faire: c’est ravaler sa rancœur et agir comme si l’on n’avait pas perçu l’agresssion. C’est l’attitude le mieux admise et la plus répandue dans les sociétés modernes. Ce qu’on appelle l’« inhibition ». On a envie de casser la figure de l’adversaire mais, étant donné qu’on a conscience du risque de se donner en spectacle, de prendre des coups en retour et de rentrer dans une spirale d’agression, on ravale sa rage. Dès lors, ce coup de poing, qu’on n’inflige pas à l’adversaire, on se l’assène soi-même. Dans ce type de situation fleurissent les maladies psycho-somatiques: ulcères, psoriasis, névralgies, rhumatismes…

La troisième voie est la fuite. Il en existe plusieurs sortes:

La fuite chimique: alcool, drogue, tabac, antidépresseurs, tranquillisants, somnifères. Elle permet d’effacer out tout au moins d’atténuer l’agression subie. On oublie. On délire. On dort. Donc ça passe. Mais ce type de fuite dilue aussi le réel et, peu à peu, l’individu ne supporte plus le monde normal.

La fuite géographique: elle consiste à se deplacer sans cesse. On change de travail, d’amis, d’amants, de lieux de vie. Ainsi on fait voyager ses problèmes. On ne les résout pas pour autant, mais on leur fait changer de décor, ce qui est déjà en soi plus rafraîchissant.

La fuite artistique, enfin: elle consiste à transformer sa rage, sa colère, sa douleur en œuvres d’art, films musiques, romans, sculptures, tableaux… Tout ce qu’on ne s’autorise pas à clamer, on le fait dire à son héros imaginaire. Cela peut ensuite produire un effet de catharsis. Ceux qui verront les héros venger leurs propres affronts bénéficieront aussi de cet effet.

BERNARD WERBER, Nouvelle Encyclopédie du Savoir Relatif et Abslou ( Albin Michel), pages 406, 407.